Détecter un accident cardiovasculaire avant qu’il ne se produise, analyser des données issues d’un scanner cérébral ou d’une radiographie dentaire : l’intelligence artificielle (IA), associée à l’innovation technologique et à l’expertise des soignants, a fait entrer la médecine dans une nouvelle ère. Celle des 4 " P ", pour médecine personnalisée, préventive, prédictive et participative.

Parmi les premières applications de l’IA en santé, figure l’aide au diagnostic. La puissance des algorithmes et leur capacité à interpréter une quantité incommensurable de données médicales permet aujourd’hui de détecter des tumeurs invisibles à l’œil nu ou encore, dans certains cas, de visualiser l’évolution d’une pathologie. Son utilisation peut donc s’avérer particulièrement précieuse pour accompagner le professionnel de santé et l’aider à affiner son diagnostic.

Des soignants " augmentés "

Pour autant, " l’IA n’a en aucun cas vocation à se substituer aux soignants et au corps médical dans son ensemble ", relève le Dr Elbaz. Ce chirurgien-dentiste de 32 ans, que rien ne prédestinait à se lancer dans la MedTech, a récemment mis au point Allisone, un logiciel basé sur l’intelligence artificielle et inspiré de sa pratique. " La subjectivité du praticien fait que nous ne sommes pas toujours constants dans l’analyse d’une radiographie dentaire, explique le Dr Elbaz. Avoir un deuxième avis est parfois préférable. Or, nous n’avons pas toujours un confrère disponible pour donner un deuxième avis. "

C’est en partie de ce constat qu’est né Allisone, un dispositif médical analysant les radios dentaires grâce à la technologie. Mon objectif était entre autres de développer un outil capable d’offrir aux praticiens une seconde lecture 24h/24 de leurs clichés, voire une analyse complémentaire, poursuit le praticien. L’IA limite l’erreur d’interprétation et peut même alerter sur certains types de lésions débutantes qui ne sont pas symptomatiques. " Et d’insister : " Nous, les soignants, traitons une personne, pas un symptôme. Le logiciel vient simplement augmenter la compétence du praticien. "

Si l’IA ne remplace pas le praticien, elle peut en revanche lui faire gagner un temps médical précieux grâce à l’automatisation de certaines tâches, faciliter la communication avec le patient, etc. 

Une relation renforcée

Malgré son jeune âge, Victoire, 24 ans, a cumulé les problèmes de santé bucco-dentaire : " J'ai passé du temps dans les cabinets dentaires et j’ai toujours eu beaucoup d'appréhension. Je me suis retrouvée face à des praticiens expéditifs, peu à l’écoute, peu enclins à vulgariser leurs propos… Ce qui m’a amené à changer de chirurgien-dentiste de nombreuses fois. " 

Désormais, l’accès à la ressource documentaire sur Internet fait entrer dans les cabinets des patients plus ou moins bien informés, qui veulent en tout cas comprendre ce qui leur arrive et comment on va les soigner. De fait, souligne le Dr Elbaz, " un patient qui ne saisit pas ce qu’on va lui faire ne pourra pas adhérer au traitement et ne reviendra pas " .

Certains vont même jusqu’à devancer leur médecin. " Un jour, l’un de mes patients est même arrivé avec son plan de traitement qu’il avait élaboré à partir de ses recherches sur le web ", se souvient le praticien, encore amusé par l’anecdote. Alors pour désamorcer les doutes et les craintes, le chirurgien-dentiste a longtemps imprimé les radios pour y faire des dessins explicatifs et vulgariser son propos, sans succès parfois. C’est de cette frustration qu’est née l’envie de créer un outil permettant de faire comprendre le soin en une image et de manière ludique. 

" La radio panoramique est projetée face au patient et le praticien peut expliquer ce qui a été fait ou ce qui va l’être via des codes couleurs qui mettent en exergue les informations, explique le Dr Coiffier, chirurgien-dentiste à Paris, qui utilise la solution d’Allisone. Et cela peut vraiment faire la différence notamment pour les cas complexes. La source de progression des patients dans leur appréhension de notre travail est impressionnante." 

" Ces outils permettent d’avancer avec le patient, de faciliter sa bonne compréhension de la thérapeutique. Et de fait, renforcer l’adhésion au traitement ", estime le Dr Elbaz qui pense d’ores et déjà à étendre son innovation à d’autres spécialités médicales

Des patients plus impliqués ?

Selon une étude menée par le Cercle de réflexion de l’industrie pharmaceutique et IMS Health, le taux moyen des patients atteints d’une maladie chronique qui suivent les recommandations de leur médecin ne serait que de 40 %. Un problème de santé publique sur lequel les outils digitaux peuvent donc avoir un impact, qu’ils soient à la main du praticien ou du patient. Objets connectés, applis e-santé… Autant d’innovations technologiques aux vertus pédagogiques qui peuvent amener le patient à devenir acteur de ses soins. D’ailleurs, des générations de patients experts de leur pathologie (souvent chronique) émergent depuis plusieurs années. Ils sont des partenaires de choix sollicités, entre autres, dans le cadre de la formation des soignants ou pour intervenir auprès d’autres patients. Tout cela concourt à la dimension participative de la médecine.

L’émergence du patient connecté et du médecin " augmenté " fait parfois craindre la fin ou, à tout le moins, la redéfinition du colloque singulier. Une notion qui renvoie à la rencontre entre le médecin et son patient ou à la rencontre entre une conscience et une confiance. " Le gain de temps permis par certains outils digitaux amène à réinvestir la relation au patient " , assure le Dr Elbaz. Un patient qui a parfois besoin d’empathie, de lien humain… ce qu’a priori l’IA ne remplacera jamais.

Maddyness, partenaire média d'Allisone