L'étude des services des statistiques et de la recherche du ministère du Travail Dares, menée auprès de 40 entreprises de plus de 1000 salariés, mesure l'écart entre le taux de rappel des candidats d'origine supposée maghrébine et française, à compétences équivalentes. Les enquêteurs ont ainsi répondu à 2400 offres d'emploi, avec 9 600 candidats fictifs, entre décembre 2019 et avril 2021, ce qui revient donc à 4 candidatures à chaque offre. Deux avec un nom et un prénom à consonance maghrébine et deux avec un nom et un prénom à consonance française. Résultat : 1516 offres ont donné lieu à un traitement équivalent des recruteurs, les autres à des discriminations. Ce qui signifie concrètement que les personnes d'origine maghrébines ont 31,5% moins de chances d'être contactées par les recruteurs que les candidats d'origine supposée française.

Une personne dont le nom ou le prénom a une consonance maghrébine " doit envoyer en moyenne 1,5 fois plus de candidatures […] pour recevoir le même nombre de réponses positives ", souligne l'étude de la Dares.

Les hauts gradés moins touchés

Onze catégories de métiers ont été analysés : commis-aide cuisiner / monteur-câbleur-préparateur de commande / employé commercial de magasin / employé administratif / développeur / ingénieur commercial en informatique / contrôleur de gestion / chargé de recrutement / directeur de magasin / directeur de restaurant et ingénieur de production. L'écart entre le rappel des candidats aux noms à consonances maghrébines et françaises est le plus important dans les métiers suivants : commis-aide de cuisine / employés administratifs / employés de magasins / chargé de recrutement et préparateur de commande.

À l'inverse, il est bien plus faible lorsque le recrutement concerne le métier de développeur (probablement en raison de la pénurie de main d'oeuvre sur ce poste), la direction de restaurant ou celle de magasins. Plus globalement, l'étude montre ainsi que les discriminations s'amenuisent avec la croissance de qualifications des candidats. Il en va de même pour les métiers en tension où l'écart tombe à 26%. L'analyse réalisée montre également que le contexte familiale - enfants, célibat - et le sexe ne font pas l'objet de discrimination particulière. Ce qui tend prouver que la discrimination concerne bien la consonance de l'identité du candidat.

"Si cette étude confirme sans équivoque l’existence de discriminations fortes à l’encontre des candidats dont l’identité suggère une origine maghrébine, elle ne permet cependant ni de distinguer directement les mécanismes sous-jacents, ni de conclure sur la façon d’y remédier. Il serait utile d’explorer davantage l’hétérogénéité des écarts entre groupes (selon le niveau de qualification, ou selon la tension sur le marché du travail concerné) pour tenter d’approfondir les sources du phénomène discriminatoire", conclut la Dares.