C’est le contact direct avec la maladie et le système de soins qui a convaincu Maud Clérice de se lancer dans ce projet. Tombée malade en 2011, cette jeune femme, qui a passé 15 ans dans la direction commerciale, fréquente les lieux de santé et prend conscience des difficultés liées à la désertification médicale : locaux vacants, professionnels de santé trop éloignés des patients, territoires ultra concurrentiels, impossibilité de se faire accompagner dans des soins de confort et de bien-être, quand on est malade. Elle, qui vient d’un village normand où il y a "plus de vaches que d’habitants" , se lance dans un tour du monde de deux ans - au cours duquel elle observe à chaque fois les failles des systèmes de santé - qui achève de la convaincre de lancer sa startup.

"Je suis née avec une malformation du cardia. Mais j’avais la chance inouïe d’avoir un excellent médecin de campagne qui venait prendre soin de moi à 4 heures du mat. Quand je suis retombée malade, à 28 ans, je me suis dit : heureusement que je vis à Bordeaux et pas dans un village d’irréductibles normands comme celui de ma maman, où on galère pour se faire soigner et accompagner dans la maladie. Pour l’avoir vécu, je sais à quel point les médecins douces, l’accompagnement relationnel, le sport, le mouvement, sont au cœur du processus de guérison."

Un échange de bons procédés

C’est comme cela que naît MyKlinica, une plateforme de partage d’espace dédié aux professionnels de santé, du bien-être et du sport. L’idée est simple : tous les propriétaires de locaux peuvent proposer leurs espaces sur cette plateforme digitale, afin que les praticiens puissent avoir accès facilement à un local pour venir ponctuellement ou de façon pérenne exercer dans des territoires isolés ou que les jeunes professionnels de santé puissent plus aisément s’installer. "Nous sommes un outil d’aide, pour tous les jeunes médecins qui sortent de 10 ans d’études et qui n’ont pas forcément envie de s’installer dans des territoires isolés, mais qui souhaitent y effectuer des missions ponctuelles. Et de cette manière, les propriétaires rentabilisent des locaux inoccupés."

Une logique gagnant-gagnant, de recyclage de locaux, comme l’exlique Maud Clérice, qui s’est d’ailleurs associée à Emilien Roso, maire de Allemans-du-Dropt et président de la communauté de communes du Pays de Lauzun (Lot-et-Garonne), afin de travailler avec les collectivités pour les aider à améliorer l'offre de soin sur leur territoire. De fait, aujourd’hui, la plupart des professionnels de la santé et du bien-être et les propriétaires de locaux utilisent de multiples outils - Facebook est la première solution de recherche de local, devançant LeBonCoin et Caducee - mais il n’existe aucune référence sur ce marché.

L’application est pour l’heure gratuite, car MyKlinica a besoin de "générer de la traction" sur cette nouvelle solution, dont le modèle économique est assez similaire à celui d'Airbnb, avec une commission d'intermédiation sur les transactions. Dans un avenir proche, Maud Clérice prépare des modules plus performants : "nous nous occuperons des baux, précaires ou professionnels, mais aussi des paiements locatifs. Nous proposerons des services d'assurance d’intermédiation, et nous gérerons le calendrier pour planifier la flexibilité des professionnels auprès des collectivités", détaille Maud Clérice. Face à l'enjeu, nul doute que l'entreprise saura trouver son public.