Après plusieurs aventures entrepreneuriales respectives, Maxime Pawlak et François Moret, avaient à cœur, au beau milieu de leur quarantaine, de porter un projet à impact positif écologique et social et, bien que n’étant pas issus du monde agricole, ils se sont rapidement retrouvés sur les problématiques de l’installation transmission.

Une inadéquation entre l’offre et la demande

"C’est un enjeu majeur pour le monde agricole, mais plus globalement pour la France. Près d’un agriculteur français sur deux devrait être amené à mettre fin à son activité dans les 10 prochaines années, ce qui ne représente pas moins de 200.000 fermes à transmettre. On estime que sur les 20.000 fermes cédées chaque année, la moitié participent à l’agrandissement d'exploitations déjà existantes ou d’entreprises et ne sont pas reprises par des jeunes désireux de s’installer.".

Pourtant, Maxime Pawlak, l’affirme, ces derniers seraient nombreux à vouloir devenir éleveur ou cultivateur, mais la problématique réside dans leur sociologie. Les jeunes agriculteurs d’aujourd’hui diffèreraient des anciens. "D’une part, bien qu’ils soient formés en agriculture, ils ne sont plus fils ou fille d’agriculteur pour autant. Ces jeunes n’ont donc pas l’opportunité de reprendre une ferme familiale et leurs moyens limitent leurs ambitions. D’autre part, ils sont souvent en recherche de sens et d’impact et ont à cœur - pour des raisons de marché, de conviction ou de pratique - d’exercer différemment. De fait, les fermes en quête d’un repreneur ne correspondent pas toujours à leurs attentes et on se retrouve face à une inadéquation entre l’offre des fermes à transmettre et la demande des jeunes générations.".

Un Tinder de l’installation-transmission

Alors, pour faire matcher ces exploitations rurales avec les critères de ces néo-agriculteurs, en 2019, Maxime Pawlak et François Moret ont fondé Eloi, une solution qui permet de réadapter les fermes en transmission pour qu'elles correspondent aux attentes des jeunes repreneurs. "Dans un premier temps, nous rencontrons les cédants et nous identifions les caractéristiques des fermes : bâtiment, foncier, activités, etc. Ça reste un deuil pour eux, mais ils sont, dans la grande majorité, plus enclins à voir leur ferme héberger une nouvelle activité agricole plutôt que de la voir partir à l’agrandissement de l’exploitation du voisin. Et, sur la base des projets d’installation des jeunes candidats qui se sont inscrits sur notre site - et qui forment aujourd’hui une communauté de près de 1.500 membres -, on projette les potentielles évolutions des fermes. C’est un mélange entre l’application Tinder et l’émission relooking extrême. Dans certains cas, il s’agit juste de changer de type d’élevage et de passer du bovin au caprin. Dans d'autres, on passe de l’élevage à la culture. Et lorsque la ferme est trop grande pour être reprise par un seul et même acquéreur, nous élaborons des grappes de fermes en créant des 2 ou 3 lots bien distincts et en y installant autant d’activités complémentaires de culture, de maraîchage ou d’élevage. Ces grappes permettent de répartir le poids financier des bâtiments et de créer des unités foncières cohérentes pour chacune des activités et d’installer des jeunes agriculteurs qui deviennent des proches voisins et qui, sur la base de leur autonomie et de leur liberté, peuvent créer des synergies.".

Accompagner la transmission et la transition

Pour voir leur candidature sélectionnée, les néo-agriculteurs doivent se prévaloir d’un projet agro-écologique et signer, lors de leur installation, une charte d’engagement dans laquelle ils sont amenés à décrire leur pratique agricole qui fera l’objet de contrôle durant 5 ans. "Tout a été défini avec notre comité de mission composé d’agriculteurs. L’idée n’est pas d’être contraignants, mais de venir contrôler l’impact écologique de l’activité d’une personne pleine de bonne volonté qui revendique une ambition très forte avec la mise en place de mesures comme la plantation de haies ou la restauration de zones humides, etc. Dans cette charte, que nous co-signons, les deux parties s’engagent à étudier des solutions d’accompagnement pour aider au développement de ces pratiques agro-écologiques grâce à des partenaires spécialisés.".

500 projets sont actuellement en cours, mais pour développer son activité, structurer son réseau, doter sa plateforme de nouvelles fonctionnalités et poursuivre un objectif de 1.000 transmissions par an sur un marché qui en compte 200.000, Eloi doit désormais renforcer son équipe. L’agritech lève 2,5 millions d’euros. Après avoir battu un record de rapidité, lors de sa première collecte sur Lita.co en bouclant en deux semaines seulement, la startup renouvelle l’expérience et passe en phase de collecte de sa campagne de financement participatif sur la même plateforme pour 500.000 euros. Eloi invite donc les investisseurs particuliers, à rejoindre ce tour de table entre seed et série A auquel figurent d’ores et déjà le groupe Groupama et des business angels du réseau Impact Business Angels.

Le cofondateur Maxime Pawlak, assure que la traction commerciale est réelle : "Aujourd’hui, lorsque nous publions une ferme sur notre réseau, nous ne recevons pas moins de dix candidatures en l’espace d’une semaine et la montée en puissance du volume se fait depuis 6 mois. Quand on part du principe que les projets de transmission de ferme prennent entre 12 et 18 mois, on sait que le gros de l’entonnoir est à venir.".