Ce chiffre, issu du tout premier observatoire des startups mis en place par la banque publique d'investissement, montre que des "signaux positifs" existent et qu'une "nouvelle vague de startups" grandissent suffisamment pour "commencer à construire des usines", a déclaré à l'AFP Paul-François Fournier, directeur exécutif chargé de l'innovation à Bpifrance. Il "faut être très prudent", a-t-il dit, "il y a encore beaucoup de chemin à faire" pour arriver à tenir l'ambition du plan d'investissement France 2030, lancé en 2021 lors du précédent quinquennat, qui prévoit de créer "100 usines nouvelles par an" dans des domaines de rupture technologique, d'ici à 2030.

Mais le vivier est en train de grandir. Selon Bpifrance, il existe actuellement 1 600 startups à vocation industrielle en France, dans toutes les régions. Et 67% ont leur siège en dehors de l'Ile-de-France. Six cents d'entre elles ont déjà levé plus d'un million d'euros en fonds d'amorçage permettant de financer le transfert de technologie entre la recherche de laboratoire et la construction d'un premier démonstrateur.  Autres chiffres illustrant le développement d'un écosystème de startups industrielles: alors qu'en 2013, le pays comptait seulement 3 startups ayant levé plus de 20 millions d'euros pour financer leur développement, elles étaient 113 en 2021, a souligné Paul-François Fournier. "Pour ce qui est des levées de fonds supérieures à 100 millions d'euros, il n'y en avait eu aucune en 2013, et il y en a eu 29 en 2021", a-t-il ajouté.

Les startups échappent au rachat par de grands groupes

Au total, 83 startups ont répondu à l'appel à projet "construction d'une première usine", dont les fonds sont issus du plan France 2030. "Un tiers environ seront sélectionnées dans la première vague, qui sera annoncée dans quelques semaines, les autres pourront l'être plus tard", a estimé Paul-François Fournier. Et trois décisions d'investissements pour de gros projets de construction d'usines ont été identifiés par le fonds SPI piloté par Bpifrance.

Du coup, la "malédiction" des startups obligées de se vendre à de grands groupes étrangers pour assurer leur pérennité, commune au début des années  2010, est "beaucoup moins forte", relève-t-il, surtout dans le secteur numérique où "des entreprises valant plusieurs milliards d'euros ont réussi à grandir en évitant de se vendre". A l'appui, il cite l'exemple de Doctolib, futur géant européen de la gestion des données de santé et des relations patients-médecins. Dans le secteur de la santé, Bpifrance couve deux pépites françaises que sont DNA Script, spécialiste de l'impression 3D d'ADN, et Treeforg, spécialiste de thérapie cellulaire basé à Bordeaux.

Dans les secteurs industriels, les startups se fondent dans un paysage déjà existant, comme Exo Trail, qui fabrique de petits moteurs électriques pour satellites. Exo Trail a un site de prototype et prévoit une usine "dans quelques mois", qui aura vocation à travailler aussi bien pour Airbus que pour Thalès. Dans la chimie verte, des startups comme Carbios, Afyren ou Metex font apparaître un écosystème "à la frontière entre la chimie et la biologie" de nature à créer une "filière innovante" pour "l'industrie de demain". Idem dans le stockage d'énergie. "On n'est pas encore capable de mesurer l'impact sur l'emploi", note Paul-François Fournier, "il faut être prudent, la désindustrialisation a pris 30 ans entre 1995 et 2015". Il faudra encore quelques années de plus pour confirmer la réindustrialisation.