21 juillet 2021
21 juillet 2021
Temps de lecture : 5 minutes
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L'accélérateur de l’Institut du Cerveau cultive spin-offs et startups tierces

Depuis 2013, l’accélérateur de l’Institut du Cerveau a accompagné 65 startups issues des biotechnologies, de l’e-santé ou de l’IA appliquée au domaine. Il s’agit de spin-offs comme de projets entrepreneuriaux externes, amenés à collaborer avec ses 650 chercheurs. Cet effet de groupe convainc laboratoires pharmaceutiques et investisseurs.
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Il a fêté ses 10 ans d’existence à la rentrée 2020. L’Institut du Cerveau (ICM) a réalisé de nombreuses recherches en matière de maladies neurologiques et psychiatriques. Fondée à partir du constat que ces pathologies progressent dans la société européenne, du fait du vieillissement de la population, la fondation privée reconnue d’utilité publique a rapidement nourri une vocation d’accélérateur de projets entrepreneuriaux. "Dès 2013, la ville de Paris et la région Île-de-France ont subventionné la création d’un accélérateur dans nos murs" , se réjouit auprès de Maddyness Alexis Génin, directeur des applications de la recherche à l’ICM, qui précise que la structure a accueilli un total de 65 startups depuis cette date. Les 650 chercheurs qui composent les unités de recherche de la fondation sont au contact des néo-entrepreneurs pour mettre leurs solutions à l’épreuve scientifiquement. "Si une startup veut percer, la validation par la communauté est cruciale."

23 % de spin-offs parmi les 65 startups

À travers son accélérateur, l’ICM fait la part belle à ses spin-offs. Ainsi, 23 % des startups suivies – ce qui représente 15 entreprises jusqu’ici – sont le fruit des travaux de ses propres chercheurs. "Ils ont de la matière pour créer des entreprises. L’innovation reste au sein de l’institut jusqu’à la preuve de concept sur l’animal. Nous profitons de ce délai pour sensibiliser et former les chercheurs à l’entrepreneuriat" , glisse Alexis Génin, qui précise s’appuyer sur divers programmes, à l’image de Bioentrepreneurs (Institut Imagine, École polytechnique, HEC et université de Paris) ou encore DeepTech Founders. L’équipe du superviseur, composée de 15 personnes, repère au jour le jour les innovations au sein des laboratoires de l’institut. "On remarque le potentiel et on mature l’idée, qui change souvent entre le moment où elle est identifiée et celui où naît la startup associée" , relève-t-il aussi, soulignant qu’environ 1 000 emplois ont été créés par les entreprises accélérées à l’ICM.

Le directeur des applications de la recherche de l’ICM note néanmoins que "le transfert de technologies est moins automatique en neurologie qu’en oncologie" . Une différence qui se veut culturelle : certaines spécialités médicales sont plus orientées vers les traitements que d’autres. La présence, au sein du bâtiment de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (Assistance publique-Hôpitaux de Paris), de l’accélérateur a l’avantage de l’ancrer dans le quotidien des laboratoires de recherche. "Nous y disposons de 1 000 mètres carrés, soit un étage sur les cinq que compte l’institut" , expose Alexis Génin, qui indique que cet espace est réservé aux travaux s'appuyant sur la recherche fondamentale dans les biotechnologies. Si ce domaine constitue bien le cœur de l’activité de l’accélérateur de l’ICM, deux thèmes annexes existent sur d’autres sites parisiens : le village de l’e-santé à Station F et la structure dédiée à l’IA et technologies médicales à Chevaleret.

Près de 300 millions d’euros levés au total

Ces trois "noyaux" accueillent aussi des startups ayant vu le jour à l’extérieur de l’ICM. La condition principale pour qu’elles puissent être hébergées : un partenariat suivi avec les unités de recherche de la fondation. Les jeunes pousses paient alors un tarif préférentiel pour exploiter les plateformes d’essai de l’institut, dont une filiale propose une prise de participation au capital lorsque c’est dans l’intérêt de chacun. "Il s’agit d’une position dormante, dans le cadre de laquelle nous n’intervenons pas dans la gestion de l’entreprise" , indique Alexis Génin, qui précise que de grands groupes peuvent aussi être hébergés en payant un prix plus élevé que les startups – c’est ce qui assure, entre autres choses, le modèle financier de l’accélérateur. À noter que, par effet de groupe, les startups accélérées depuis la création de ce dernier ont levé près de 300 millions d’euros au total.

Parmi les entreprises qui ont grandi dans les murs de l’ICM figurent quelques noms bien connus, tels que BioSerenity. La jeune pousse, à l’origine de solutions de diagnostic et de monitoring des patients, a été fondée avec l’appui d’un médecin-chercheur de l'institut et figure aujourd’hui au Next 40. "Nous continuons à collaborer sur certains projets" , assure Alexis Génin, qui affirme que le succès de la MedTech a motivé la création d'une filiale d'investissement au sein de l'institut. Parmi les autres réussites de la structure : BrainVectis, dont la propriété intellectuelle initiale est issue de travaux de l’Inserm (Institut national de la santé et de la recherche médicale) et du CEA (Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives). La startup et sa solution de thérapie génique pour la maladie de Huntington ont depuis été rachetées par AskBio, qui a elle-même rejoint le géant allemand Bayer. Fondée récemment, Asfalia Biologics entend optimiser la médecine régénératrice et l’immunologie au moyen de la thérapie génique. "Elle a été créée par trois chercheurs de l’ICM, qui figure au capital" , se félicite ainsi le superviseur de la structure.

"Faire passer les scientifiques de la recherche à l’entrepreneuriat paraissait être une idée saugrenue, il y a quelques années encore. Il faut continuer à les encourager à ne pas se focaliser sur la seule excellence académique" , estime Alexis Génin. Sur le même modèle que d’autres incubateurs et accélérateurs, l’ICM s’attache donc à sensibiliser : rencontres avec des chercheurs qui travaillent dans le même domaine, dispositif de ‘soft landing’ pour déterminer comment améliorer la preuve de concept et bâtir un business plan et, lorsque c’est nécessaire, construction d’un pitch deck avant de lever des fonds. En spécialiste des BioTech, la fondation met l’accent sur la méthodologie pour mener des essais cliniques. "Il est question de réglementation et de protocoles. Il faut pallier le manque de connaissance sur le passage de la théorie à la pratique" , avance ainsi le directeur des applications de la recherche, qui souligne que l’unité Neurotrial a été mise en place pour accompagner cette transition. Deux essais cliniques ont lieu au sein de l’accélérateur. De quoi tenter d’autres chercheurs de l’ICM d’entreprendre, alors que seule une vingtaine s’est lancée jusqu’ici.