21 juin 2022
21 juin 2022
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100 licornes en 2030 : les VCs jugent l'objectif d'Emmanuel Macron atteignable

Lors de son intervention au salon VivaTech, le vendredi 17 juin 2022, Emmanuel Macron s’est félicité que l’objectif de 25 licornes françaises soit atteint avant 2025. Il en a profité pour fixer un nouveau cap : 100 licornes, dont 25 GreenTech, en 2030. Maddyness a sondé quatre investisseurs pour déterminer si le défi peut être relevé.
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Photo par Ludovic MARIN / POOL / AFP

Romain Dehaussy, associé chez Cambon Partners : "10 licornes par an"

Pour jauger si l’objectif de 100 licornes en 2030 est atteignable, "il faudrait démarrer par une étude statistique se basant sur les Séries A sur 2021-2022 et prendre 2 paramètres : le temps que cela prend pour passer de la série A à licorne et la probabilité que cela arrive. Le même procédé devrait être reproduit avec les séries B. Nous avons 25 licornes, il en faut 100 dans 8 ans. Cela en fait 10 nouvelles par an pour atteindre l’objectif. Il y a des éléments positifs enclenchés depuis des années : transition numérique de l'économie, professionnalisation du secteur de la tech, etc. Mais un facteur négatif est à prendre en compte, désormais : la baisse des valorisations. Il y a assez d'argent en late stage, mais les entrepreneurs se plaignent de la difficulté de trouver des talents. Il faut donc mettre le cap sur la formation avec des écoles spécialisées et le recrutement de talents étrangers.

Il ne faut pas opposer la consolidation des licornes actuelles et l’émergence de nouvelles, mais des priorités doivent être établies. Aider les jeunes pousses à émerger me semble être essentiel. On peut penser que les EcoVadis et autres Sorare sont suffisamment fortes et internationales pour ne pas être aidées par les pouvoirs publics. Quant à l’objectif de 25 licornes vertes, nous constatons une montée en puissance du domaine, par conviction ou opportunisme, et, en parallèle, l'émergence de fonds spécialisés. Espérons, que cela fasse émerger ces licornes vertes, qui seront une bonne nouvelle pour l'environnement."

Julien-David Nitlech, managing partner chez Iris Capital : "Contribuer à l’emploi et la société"

"Il y aura de plus en plus de licornes. Et une centaine dans les huit prochaines années, pourquoi pas ! Je ne sais pas, cela dit, si nous parlerons de licornes en 2030. Il s’agit de sociétés technologiques nées ces 3 à 10 dernières années, suffisamment révolutionnaires pour croître à toute allure et devenir en quelques années des sociétés internationales, employant des centaines ou milliers d’employés, apportant des modèles numériques ou industriels pérennes, qui transforment leur marché en amenant les usages d’avenir. Nous avons déployé énormément d’efforts et de capitaux pour en arriver là où nous en sommes. Nombre de licornes actuelles prouvent que le bassin de création de startups croît, mûrit, s’enrichit, s’industrialise et façonne les entrepreneurs de demain, encore employés par les licornes d’aujourd’hui. Il va falloir continuer à les financer, tout en leur apprenant à croître plus profitablement ainsi qu’à endosser un rôle sociétal ou environnemental fort.

Il convient de pérenniser les licornes en entérinant leur modèle et en les finançant encore un peu pour leur permettre d’atteindre la profitabilité. Il faut en consolider d’autres, qui bénéficieront de la mutualisation de leurs produits ou clients. La valorisation de certaines, notamment celles qui ont levé beaucoup et vite, peut s’avérer être un handicap face aux marchés moins enthousiastes envers les valeurs tech depuis le début 2022. Je crois, cependant, que celles qui ont un modèle économique éprouvé et un réseau de clients internationaux continueront à lever des fonds pour financer leur R&D et leur expansion. Le marché sera peut-être moins tendre avec des sociétés dépendantes de leurs levées de fonds pour gagner des parts de marché ou trop peu diversifiées… L’enjeu est de s’assurer que ces sociétés puissent contribuer à l’emploi, à la qualification et à la société de demain.

Un objectif ambitieux en matière de licornes vertes donne aussi une feuille de route aux investisseurs et pouvoirs publics pour soutenir des technologies qui ont un sens et vont aider nos entreprises à faire leur transition écologique, sociétale ou économique. Il y a six ans seulement naissait la première (et seule, à date) licorne industrielle, Exotec. Le secteur de l’impact s’est diversifié et de nombreux autres sont positivement affectés : la gestion de données, l’énergie, le commerce, le transport, le bâtiment, l’industrie, etc. Et l’urgence nous guette. Elle crée des marchés. Nous partons de loin, mais le besoin et la vitesse technologique sont tels que l’objectif n’est pas forcément inatteignable."

Fanny Picard, fondatrice d’Alter Equity : "Les GreenTech en croissance malgré la crise"

"L’objectif de 100 licornes en 2030 est ambitieux, mais de nombreuses entreprises prometteuses sont des candidates potentielles. Je pense donc qu’en huit ans, nous pouvons y parvenir, même si les niveaux de valorisation tendent à diminuer. Les dispositifs en place sont déjà efficaces, avec de beaux fonds, des dirigeants impressionnants et un écosystème très professionnel. Il me semble tout à fait possible et souhaitable de combiner ces deux objectifs de consolidation des licornes existantes et d’émergence de nouvelles.

EcoVadis me semble former la première licorne verte. Les GreenTech approchant une valorisation d’un milliard d’euros sont peu nombreuses, mais la croissance dans ce secteur est exceptionnelle et permet d’envisager des accélérations fortes de valorisation. Ainsi, le chiffre d’affaires des entreprises de notre deuxième fonds Alter Equity3PII ressort en croissance moyenne de 103 % en 2021 par rapport à 2020, après 94 % en 2020 en comparaison avec l’exercice précédent, malgré la crise sanitaire."

Éric Gossart, partner chez Serena Capital : "La valorisation n’est pas l’unique facteur de réussite"

"L’objectif de 100 licornes en 2030 est atteignable : jamais nous n'avons compté autant d'entrepreneurs, autant de C-levels formés à bonne école dans des scaleups, et autant d'investisseurs ayant l’expérience de construction de licornes. Ce n'est qu'un début, et l'accès au financement doit être fluidifié, notamment auprès d'investisseurs étrangers. Il me semble aussi important de faciliter l'accès au marché européen pour nos startups afin de leur permettre d'élargir le taille de marché adressable. Consolider les licornes actuelles et en faire émerger de nouvelles ne sont pas deux choses incompatibles. Il serait surtout intéressant que le marché gagne en maturité et ne suive pas la valorisation de la société comme unique facteur de réussite. Ce n'est qu'un marqueur de valeur à un instant T, qui peut fluctuer. On le voit, en ce moment, sur les marchés. D'autres critères doivent être intégrés : le revenu, les critères RSE ou encore le bien-être des employés, par exemple.

À mon sens, 100 % des licornes devraient être "vertes". Comment, aujourd’hui, imaginer un champion économique n'ayant pas intégré dans son modèle les enjeux sociaux et environnementaux du XXIe siècle ? Le chiffre de 25 d’ici à 2030 est, d’ailleurs, sans doute sous-estimé. Nous avons des pans entiers de l'industrie qui doivent se réinventer et se décarboner. L'industrie de la tech a connu une croissance phénoménale ces cinq dernières années, c'est ce même chemin que vont emprunter les sociétés dites "vertes". Nous avons déjà des exemples à suivre, avec EcoVadis ou Ÿnsect. D’autres vont suivre, comme Sweep ou Accenta. Les fonds se structurent : nous venons, pour notre part, d'annoncer Racine², un fonds de 85 millions d'euros dédié à ces enjeux avec makesense."